Je retrouve Attila un samedi soir, après plusieurs semaines sans nouvelles. La dernière fois, j’avais quitté sa maison encore étourdie par ce que j’y avais vécu. Ce soir, il m’a promis quelque chose d’aussi intense, mais différent. En début de semaine, il m’a glissé un message: ‘tu ne seras pas la seule femme cette fois’. Une phrase anodine, mais qui a suffi à réveiller ma curiosité et, je l’avoue, une légère appréhension.
J’ai déjà vécu ce genre de soirées à plusieurs femmes, et souvent, elles changent le ton car moins directes, plus retenues. Parfois, les regards se croisent avec prudence, et la sensualité prend une autre forme, mais je fais confiance à Attila. Il connaît mes envies, mes rythmes, mes manières d’entrer dans la fête, et surtout il a ce talent rare de rendre les choses à la fois naturelles et magiques.
La route vers le Doubs est sinueuse. Je me perds presque entre deux hameaux, sous un ciel sans lune. Le GPS hésite, puis m’indique enfin un petit chemin bordé de haies. J’aperçois des lumières au loin, des rires qui s’échappent dans la nuit, et je me dis que je suis au bon endroit. Une autre voiture arrive en même temps que moi. Une blonde en sort, belle, un peu réservée, le regard clair et curieux. On échange un sourire complice. On ne se connaît pas encore, mais on comprend déjà qu’on va partager quelque chose d’inoubliable.
Attila vient nous accueillir sur le seuil de la porte, grand sourire, chemise ouverte. Il nous guide à l’intérieur. La chaleur de la maison nous enveloppe aussitôt entre musique, éclats de voix, bouteilles déjà ouvertes, lumières tamisées. L’ambiance est bien plus festive que ce à quoi je m’attendais. La dernière fois, tout était feutré, presque cérémonieux. Ce soir, c’est vivant, presque bruyant, un mélange d’énergie, de curiosité, d’envie.
Sur un grand mur, un projecteur diffuse une image: une webcam en direct, branchée sur un site de rencontres libertines. Quelques-uns des invités s’amusent à faire coucou à la caméra. Je ris. Ce n’est pas vraiment mon univers, mais l’atmosphère est légère, joyeuse, et puis il y a du monde, beaucoup plus que je ne pensais. Des hommes, presque tous jeunes, souriants, confiants avec des regards chaleureux. Je sens monter cette chaleur particulière entre un mélange de timidité, d’excitation et d’envie d’oser.
Dans un coin, l’autre femme, la blonde arrivée avec moi, discute déjà avec un couple que je reconnais, et là, surprise. Une troisième femme est aussi de la fête. Seule, élégante, un peu mystérieuse. Trois femmes, une quinzaine d’hommes. L’équilibre parfait pour une soirée qui promet d’être mémorable.
Attila me tend une coupe de champagne, que je refuse d’un geste amusé. Je suis trop nerveuse pour boire. J’ai envie que la soirée commence vraiment, de sentir la tension se transformer en mouvement. Les autres rient, trinquent, se racontent des anecdotes. Moi, je sens mon cœur battre un peu trop vite. J’observe. J’écoute la musique. Je me dis que tout peut basculer d’un instant à l’autre, et puis, comme souvent, c’est un simple regard qui déclenche tout.
Un homme s’approche, un peu à l’écart du groupe. Son sourire est calme, son geste sûr. Il me parle peu, mais ses yeux me demandent clairement s’il peut s’approcher davantage. Je hoche la tête. Les autres rient encore dans la pièce, mais quelque chose change. Le temps ralentit, la pièce semble s’assombrir autour de nous. Il pose la main sur mon épaule, un geste simple mais précis, comme une invitation à lâcher prise.
Tout devient plus fluide. La musique couvre nos respirations. Les conversations continuent, mais elles se fondent dans le décor. Le salon prend l’allure d’une scène vivante, faite de gestes, de frôlements, de curiosité partagée.
Je sens plusieurs présences autour de moi. Des voix qui se rapprochent, des mains qui explorent timidement d’abord, puis plus franchement. Des éclats de rire, des respirations plus lourdes. Je perçois les mêmes sons du côté de l’autre divan, où la blonde s’amuse déjà. À l’étage, la troisième femme a disparu avec quelques invités. L’espace entier vibre, respire, s’anime d’un rythme commun.
Je ne sais pas exactement combien de temps passe. Tout s’enchaîne naturellement, sans qu’il y ait besoin de parler. J’ai le sentiment d’être dans une fête où chacun joue à accorder son énergie à celle des autres. Les visages se croisent, les souffles s’entremêlent. C’est une danse étrange, libre, sans chef d’orchestre.
La chaleur augmente. Je sens la sueur perler sur ma nuque, la musique ralentir à mesure que les gestes se font plus précis. Je ne pense plus à rien. Mes sens prennent le relais. Tout ce qui m’environne devient tactile, sonore, olfactif. La chaleur des corps, les murmures, la peau contre la peau, les respirations qui s’accordent.
Ce qui me frappe, c’est cette générosité silencieuse. Personne ne force, personne ne s’impose. Chacun vient, repart, revient, propose un contact, un frôlement, une caresse. Je n’ai plus la notion du temps. Il y a juste cette impression d’onde continue, de plaisir partagé sans compétition, sans scène.
À un moment, je tourne la tête. La blonde que j’ai vue arriver rit aux éclats, allongée sur le deuxième canapé, entourée de silhouettes. La troisième femme, elle, est revenue du haut, les joues roses, les cheveux défaits, et se mêle à nous comme si elle n’était jamais partie. Les verres de champagne s’entrechoquent, les rires fusent. C’est une fête sensuelle, mais joyeuse, vivante, presque douce malgré son intensité.
Je ferme les yeux. J’écoute. L’air est chaud, épais, saturé de parfums de peau et de musique. La lumière rouge filtre à travers un abat-jour et peint des reflets dorés sur les épaules et les hanches. Tout est lent, mais vibrant. On se frôle, on se caresse, on s’abandonne.
Je ne saurais dire combien de temps dure cette euphorie. Deux heures, peut-être plus. Les rythmes s’enchaînent, se mêlent, s’épuisent et renaissent. À certains moments, le rire d’une femme résonne comme une étincelle dans le brouhaha. À d’autres, c’est le silence qui s’installe, épais, plein d’émotions, comme après une grande vague.
Quand la fatigue s’installe, je me lève doucement. J’ai chaud, le cœur qui bat encore à toute allure. Je traverse le salon. Tout est un peu flou, les lumières, les visages. On me tend un verre, enfin. Je le prends cette fois. Le champagne pétille, léger, presque froid sur mes lèvres brûlantes.
Je m’assieds, je regarde autour de moi. Les conversations reprennent, les rires aussi. Certains dansent à nouveau, d’autres se prélassent sur les canapés. Les deux femmes sont là, rayonnantes, détendues, avec ce même sourire de satisfaction tranquille. On se regarde, on éclate de rire sans savoir pourquoi. La tension est retombée, remplacée par une forme de complicité muette.
Je me sens bien. Légère. Épuisée et vivante à la fois. Je parle un peu avec eux, je découvre que l’autre blonde vient de Suisse, que la femme seule est de Lyon. On échange des anecdotes, on plaisante sur la route, sur nos hésitations du début. Le temps retrouve son rythme normal.
Quand je quitte la maison, un peu après minuit, le ciel s’est dégagé. Je roule lentement dans la nuit, les fenêtres entrouvertes. L’air du Doubs sent le bois humide et la terre fraîche. Je repense à la soirée, à l’ambiance inattendue, à la chaleur humaine, à la générosité de tous. Rien n’a été forcé, rien de vulgaire, juste une liberté simple, une fête de corps et de regards.
Je souris dans la voiture. Je sens encore sur ma peau la trace des contacts, la douceur du moment, le goût d’un champagne tiède. C’était une soirée unique, un mélange de surprise et de plaisir partagé, et je me dis sans rire qu’il n’y a vraiment qu’Attila pour réussir ça.
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